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Les multiples facettes d’Otobong Nkanga

Les multiples facettes d’Otobong Nkanga

Peinture, dessin, photographie, sculpture, installation, vidéo, tapisserie… Otobong Nkanga, dont la Collection possède un triptyque de photographies, Alterscapes : playground, multiplie les médias et les matériaux pour créer des œuvres plurielles et protéiformes. Un fil rouge les relie : une attention particulière aux paysages, à l’architecture et à l’histoire. À l’occasion de l’exposition qui lui est consacrée à la prestigieuse Tate St Ives, focus sur une œuvre aux multiples facettes.

 

 

Ruptures

Nkanga est née en 1974 à Kano au Nigeria et rêve de se consacrer à l’art dès son plus jeune âge. Plusieurs ruptures – deuils, incendie, déménagements – émaillent sa jeunesse, mais elle étudie ensuite à l’Awolowo University d'Ile-Ifé, à l’École Supérieure des Beaux-Arts de Paris, puis à la Rijksakademie à Amsterdam, avant de s’installer à Anvers, en Belgique. À l’origine axée sur la performance, sa pratique, fractionnée et cohérente à la fois, mobilise et entremêle un large panel de médias, comme pour manifester l’intérêt de l’artiste pour les frontières et leur abolition. Plutôt que de s’intéresser à ce qui sépare, Otobong Nkanga travaille en effet sur le déplacement et la circulation : avec Baggage (2007-2008) par exemple, happening qui reprend l’un de ceux du pionnier de la performance Allan Kaprow, elle déplace du sable néerlandais au Nigeria et vice-versa, manière d’aborder subtilement la question de la circulation des matières premières et des migrations.   

 

Liens

Mais c’est avant tout en tissant des trames narratives que l’artiste créé des liens entre le singulier et le collectif, la poésie et le politique. Qu’elle aborde des souvenirs d’enfances comme avec Contained Measures of Tangible Memories (2009 –) ou qu’elle travaille sur la matérialité du paysage avec Taste of a Stone (2010), elle créé correspondances et synesthésies, mêlant passé et présent, goût et toucher. L’installation In Pursuit of Bling (2014) retrace quant à elle le parcours de minerais comme le mica de matières premières à produits manufacturés : cette trame permet à Nkanga de mêler tapisseries, textes, objets et vidéos, mais aussi recherches historiques et biologiques, et réflexions sur la marchandisation de la nature, sur l’amour de l’humanité pour ce qui brille, et donc sur l’exploitation et le capitalisme.  

 

Prismes

La pluralité des formes se fait écho de la pluralité des points de vue. Nkanga cherche à abattre les délimitations tant dans la forme – pas de murs de partition dans son exposition à la Tate St Ives, « From Where I Stand [De mon point de vue] » – que dans le fond – elle souligne volontiers la plasticité des identités, multiples et en constante évolution – pour souligner sa singularité propre tout comme celle du spectateur. « Lorsque l’on raconte une histoire, les gens se l’approprient différemment selon leur culture, leurs croyances ou leur expérience de vie. Chaque fois qu’une histoire est racontée, elle sera filtrée et dite d’une manière différente. Je ne considère pas la narration comme la fin d’un trajet mais comme un processus continu qui se répercute et impacte notre manière de voir le monde », explique l’artiste. En multipliant les prismes, Otobong Nkanga dessine une œuvre et une vision du monde en une infinité de facettes.

 

C. Perrin

 

À voir > à la Tate St Ives, Porthmeor Beach, St Ives, Cornwall TR26 1TG, Angleterre

Du 21 septembre 2019 au 5 janvier 2020, tous les jours de 10h à 17h20 https://www.tate.org.uk/visit/tate-st-ives > à la Biennale de Venise, Sestiere Castello, Campo della Tana, 30122 Venise

Jusqu’au 24 novembre, du mardi au dimanche de 10h à 18h https://www.labiennale.org/en/art/2019 au Zeitz MOCAA au Cap

Du 21 novembre au 23 février 2020, tous les jours de 10h à 18h https://zeitzmocaa.museum/

 

Crédit image : Courtesy de l'artiste